Boncan d'Enfer (2002)


Docteur Renaud, Mister Renard

Comme y'a eu Gainsbourg et Gainsbarre 
Y'a le Renaud et le Renard,
Le Renaud ne boit que de l'eau
Le Renard carbure au Ricard,
Un côté blanc, un côté noir
Personne n'est tout moche ou tout beau,
Moitié ange et moitié salaud
Et c'est ce que nous allons voir.

Docteur Renaud, Mister Renard

Renard est un sacré soiffard 
Renaud est sobre comme un moineau,
Quand Renaud rejoint son plumard 
Renard s'écroule dans l'caniveau
Renaud se méfie des pétards
Et du chichon qui rend idiot
Renard se les roule peinard
Pour s'exploser le ciboulot

Docteur Renaud, Mister Renard

Renaud s'efforce, c'est son boulot
D'écrire de jolies histoires
Pour séduire les gens, les marmots
Pour amuser pour émouvoir
A la pointe de son stylo
Le Renard n'a que des gros mots
La parano et le cafard
N'lui inspirent que des idées noires

Docteur Renaud, Mister Renard

Renaud souffre de tous les maux
Qui accablent ce monde barbare
Il porte les croix sur son dos
Des injustices les plus notoires
Renard désabusé, se marre
Se contrefout de ce bazar
Le monde peut crever bientôt
Renard s'en réjouirait plutôt

Docteur Renaud, Mister Renard

Renaud a choisi la guitare
Et la poésie et les mots
Comme des armes un peu dérisoires
Pour fustiger tous les blaireaux
Renard, c'est son côté anar
Crache sur tous les idéaux
Se moque du tiers comme du quart
Des engagements les plus beaux

Docteur Renaud, Mister Renard

Renaud mérite les bravos
Car en amour et c'est sa gloire
Il est tendre comme un agneau
Pour une seule et même histoire
Renard se frotte à toutes les peaux
A que des aventures d'un soir
Avec des canons, des cageots
Renard s'rait-il un brin vicelard ?

Docteur Renaud, Mister Renard

C'est à cause du désespoir
Qui tombe à 50 ans bientôt
Que le Renard, tôt ou tard
Prendra le dessus sur Renaud
Aujourd'hui son amour se barre
Son bel amour, sa Domino
Elle quitte le vilain Renard
Mais aimera toujours Renaud

Docteur Renaud, Mister Renard
 

P'tit pédé

T'as quitté ta province coincée
Sous les insultes, les quolibets
Le mépris des gens du quartier
Et de tes parents effondrés 
A quinze ans quand tu as découvert
Ce penchant paraît-il pervers
Que tu l'as annoncé à ta mère
J'imagine bien la galère
Petit pédé

T'aurais été noir pas de lézards
Besoin d' l'annoncer à personne
Mais c'est franchement une autre histoire
Que d'avouer j'aime les hommes
C'est pas d' ta faute, c'est la nature
Comme l'a si bien dit Aznavour
Que c'est quand même sacrement dur
A l'âge des premières amours
Petit pédé

Toute sa vie à faire semblant
D'être normal comme disent les gens
Jouer les machos à tout bout de champ
Pour garder ton secret d'enfant
Dans le p'tit bled d'où tu viens
Les gens te traitaient pire qu'un chien
Il fait pas bon être pédé
Quand t'es entouré d'enculés
Petit pédé

A Paris tu as débarqué 
Dans les back-room du Marais
Dans ce ghetto un peu branché
Tu as commencé à t'assumer
Pour tous les homos des bars gays
Tu étais un enfant perdu
Tu as été bien vite adopté
Même si c'était pour ton cul
Petit pédé

	Tu t'es laissé aller parfois
A niquer plus que de raison
C'est ta liberté, c'est ton droit
T'as heureusement fais attention
Tu t'es protégé de ce mal
Qui a emporté tant de tes potes
Face à ce virus infernal
Tusortais jamais sans capotes
Petit pédé


Bientôt tu trouveras un mec
Un moustachu ou un gentil
Alors tu te maqueras avec
Pour quelques jours ou pour la vie
Rêverez peut-être d'un enfant
Y en a plein les orphelinats
Sauf que pour vous papa, maman
C'est juste interdit par la loi
Petit pédé

Tu seras malheureux parfois
La vie c'est pas toujours le pied
Moi qui ne suis pas comme toi
Le malheur j'ai déjà donné
Qu'on soit tarlouze ou hétéro
C'est finalement le même topo
Seul l'amour guérit tous les maux
Je te le souhaite et au plus tôt
Petit pédé
Petit pédé
 

Je vis caché

Loin des projos, loin des télés
Et des animateurs blaireaux
Tous ces crétins dégénérés
Fringués, coiffés comme des proxos
Loin des journaux et des radios
Des interviews conformistes
Par des zombies mongolitos
Un peu nazes, souvent fumistes
Loin des questions parfois obscènes
Ridicules ou bien vicelardes
Des nullos de la bande FM
Rois de la musique ringarde

Pour vivre heureux, je vis caché
Au fond de mon bistrot peinard
Dans la lumière tamisée
Loin de ce monde de bavards

Loin des boîtes, des fêtes branchées
De la jet-set et du showbizz
Des pétasses cocaïnées
Et des bellâtres à la dérive
Loin des premières où tout Paris
Vient poser sans aucun scrupule
Pour quelques pauvres paparazzi
Qui aiment mitrailler les nuls
Loin des cocktails, dîners
Des mondanités imbéciles
Entre starlettes d'un seul été
Au QI frisant le débile

Pour vivre heureux, je vis caché
Au fond de mon bistrot peinard
Avec mes potes, des vrais de vrais
Loin de ce monde de fêtards

Loin des meetings, des réunions
Des manifestations de rues
J'écoute la colère qui fond
Sur nos dirigeants corrompus
Mais bouger mon cul, m'engager
C'est pas demain que vous m'y reprendrez
A part peut-être José Bové
Qui pourrais-je jamais aimer ?
Je rêve d'un monde plus humain

	Et je laisse parler ce brave
Les pétitions c'est plutôt bien
Mais vous n'y verrez plus mon blaze

Pour vivre heureux, je vis caché
Au fond de mon bistrot peinard
Taciturne, désabusé
Loin de ce monde de barbares

Loin des conversations minables
Sur les charmes surfabriqués
De quelques ados improbables
Dans un loft télévisé
Très loin des stars académiques
Et des popstars de mes deux
Qui sont un peu à la musique
Ce que le diable est au bon dieu
J'irai pas prendre quelques bâtons
Pour servir la soupe à ces branques
Les télés vous prennent pour des cons
J'irai pas chanter pour ces glands

Pour vivre heureux, je vis caché
Au fond de mon bistrot peinard
Dans la lumière tamisée
Loin de ce monde de ringards

Pour vivre heureux, je vis caché
Au fond de mon bistrot peinard
Dans la lumière tamisée
Loin de ce monde de ringards

De ringards
 

Coeur Perdu

La liberté c'est l'enfer
Quand elle tombe sur un cœur prisonnier
Enchaîné comme aux galères
Au cœur de son âme sœur, de sa moitié
Les chaînes se sont brisées
Et mon cœur n'appartient plus à personne
A quarante ans bien sonnés
J'ai peur qu'il ne soit perdu à jamais

Cœur à prendre, pas à vendre, à donner
Un peu naze, un peu d'occase, un peu cassé
Cœur en miettes, en détresse, en compote
En morceaux, en lambeaux, au fond des bottes

Il a aimé bien longtemps
La plus belle de tous les temps
Il a chanté, 
L'a battu pendant vingt ans 
Pour un amour à présent
Envolé
Il a eu plus que d'aucuns
Du bonheur au quotidien
Chaque seconde
Il a pleuré en silence
Pour l'éternelle souffrance
De ce monde

Cœur à prendre, pas à vendre, à donner
Un peu naze, un peu d'occase, un peu cassé
Cœur en miettes, en détresse, en compote
En morceaux, en lambeaux, au fond des bottes

Qui voudra bien ramasser
Ce petit cœur abandonné, à la casse
C'est pas un cadeau ma belle
Il est plein d'idées rebelles
Mais hélas, il aura du mal un jour
A croire encore à l'amour
Si tu veux
Je t'offre ce cœur perdu
Qui n'aimera jamais plus
Ou si peu

Refrain (2 fois)
 

Manhattan-Kaboul

Petit Portoricain, bien intégré quasiment New-yorkais
Dans mon building tout de verre et d'acier,
Je prends mon job, un rail de coke, un café,

Petite fille Afghane, de l'autre côté de la terre,
Jamais entendu parler de Manhattan,
Mon quotidien c'est la misère et la guerre

Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant,
Pulvérisés, sur l'autel, de la violence éternelle

Un 747, s'est explosé dans mes fenêtres,
Mon ciel si bleu est devenu orage,
Lorsque les bombes ont rasé mon village

Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant,
Pulvérisés, sur l'autel, de la violence éternelle

So long, adieu mon rêve américain,
Moi, plus jamais esclave des chiens
Ils t'imposait l'islam des tyrans
Ceux-là ont-ils jamais lu le Coran ?

Suis redev'nu poussière,
Je s'rai pas maître de l'univers,
Ce pays que j'aimais tell'ment serait-il
Finalement colosse aux pieds d'argile ?

Les dieux, les religions,
Les guerres de civilisation,
Les armes, les drapeaux, les patries, les nations,
Font toujours de nous de la chair à canon

Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant,
Pulvérisés, sur l'autel, de la violence éternelle

Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant,
Pulvérisés, sur l'autel, de la violence éternelle
 

Elle a vu le loup

T'as vu Lolita,
Ta pote Marylou,
Qu'a quinze ans comme toi,
Qu'j'ai connue bout de chou,
T'as vu comme elle a
changé tout d'un coup ?
Eh ben, ma doudou,
Elle a vu le loup.
J'vais pas lui r'procher,
Eh, c'est pas un crime,
A peine un péché, 
Et des plus minimes.
D'après sa copine,
Qui l'a balancée,
C'est à la mi-août
Qu'elle a vu le loup.

C'est plus pour la frime
Que pour le frisson
Qu'un soir de déprime
Un gentil couillon
A eu le grand bonheur
De gagner l'pompon,
De cueillir sa fleur
Avant la saison.

Hormis la jouissance
D'emmerder ses vieux,
Y avait pas urgence,
Y avait pas le feu,
D'autant qu'la romance
A duré bien peu.
Elle a vu le loup
Deux minutes en tout.

Pour la performance,
Et puis pour l'extase,
La pauvre est, malchance,
Tombée sur un naze,
Vilain comme un pou,
Maladroit comme tout.
Elle a vu le loup,
Il vaut pas un clou.

Elle a vu le loup,
Tant mieux ou tant pis,
C'était pas un bon coup,
Ni un bon parti.
J'lui jette pas la pierre,
J'crée pas une émeute.
Y paraît qu'sa mère
A vu toute la meute.
Quant à toi, ma fille,
Ma jolie pucelle,
Suce encore ton pouce,
Joue à la marelle.
C'qu'a fait Marylou,
Eh ben, tu t'en fous.
Elle a vu le loup,
C'était un voyou !
Mais j'espère, ma douce,
Que quand viendra l'heure
De prendre cette Bastille
Sous ta robe à fleurs,
Le loup aura l'heur
De te plaire autant
Pour son joli cœur
Que pour ses talents.

S'il est, ce beau jour,
Doux comme un agneau,
Donne lui ton amour
En paquet-cadeau,
En plus du diamant
Que tu gardes encore,
Mais combien de temps ?
Au creux de ton corps
 

Tout arrêter

J'ai arrêté la mer, refourgué mon bateau
Vécu trop de galères dans des pays trop chauds
Je me suis échoué dans un bar à matelots
Rue de la Soif, aux remparts de Saint Malot

Tout arrêter
Terminé
Fini l'aventure, le vent salé
Le voyageur est fatigué
Mais jamais je n'arrêterai de t'aimer

J'ai arrêté la mob, le roller, le vélo
Au volant de leurs bagnoles y a bien trop de blaireaux
Suis redevenu piéton Où mes pas aussitôt
M'ont conduit sans encombre jusqu'au premier bistrot

Tout arrêter
Terminé
Je quitte le chemin des écoliers
Le patineur est fatigué
Mais jamais je n'arrêterai de t'aimer

J'ai arrêté un jour d'exercer mon boulot
Renoncé à parler aux journaleux idiots
J'ai rangé ma guitare et coupé mon micro
Arrêté la musique et arrêté les mots

Tout arrêter
Terminé
Fini les chansonnettes, ma voix enfumée
Le troubadour est fatigué
Mais jamais je n'arrêterai de t'aimer

J'ai arrêté de croire en tous les idéaux
Arrêté de donner mon obole aux restos
Je n'ouvre plus mon cœur qu'à mes potes au bistrot
Et à mon bel amour qui me quitte bientôt

Tout arrêter,
Terminé
Finis les utopies, les rêves brisés
L'coeur d'artichaut est fatigué
Mais jamais je n'arrêt'rais de t'aimer

Jamais je n'arrêt'rais de t'aimer
Jamais je n'arrêt'rais de t'aimer
 

Baltique

Ils ont peut-être eu peur que je pisse
Sur le marbre du bénitier
Ou pire que je m'accroupisse
Devant l'autel immaculé
Peur que je ne lève la patte
Quelque part dans les allées
Où siège cette foule ingrate 
Qui nous parle d'humanité
Ils ont considéré peut-être
Que c'est un amour pas très catholique
Que celui d'un chien pour son maître
Alors, ils m'ont privé de cantiques
Un jour pourtant je le sais bien
Dieu reconnaîtra les chiens

Me voilà devant la chapelle
Sous cette pluie qui m'indiffère
Tenu en laisse par un fidèle
Allergique aux lieux de prières
Les gens parlent à côté de moi
Tu as de la chance toi au moins
La souffrance ne t'atteint pas
L'émotion c'est pour les humains
Et dire que ça se veut chrétien
Et ça ne comprend même pas
Que l'amour dans le cœur d'un chien
C'est le plus grand amour qu'il soit
Un jour pourtant je le sais bien
Dieu reconnaîtra les chiens

Je pourrais vivre dans la rue
Etre bourré de coups de pieds
Manger beaucoup moins que mon dû
Dormir sur le pavé mouillé
En échange d'une caresse
De temps en temps d'un bout de pain
Je donne toute ma tendresse
Pour l'éternité ou plus loin
Prévenez-moi lorsque quelqu'un
Aimera un homme comme moi
Comme j'ai aimé cet humain
Que je pleure tout autant que toi
Un jour pourtant je le sais bien
Dieu reconnaîtra les chiens
Un jour pourtant je le sais bien
Dieu reconnaîtra les chiens
 

L'entarté

Victime d'attentats pâtissiers
Ah! Qu'est-ce qu'il nous a fait marrer 
Le philosophe des beaux quartiers
La chemise blanche en décolleté 

La suffisance est son métier
Mais putain c'qu'on a rigolé
Quand il a voulu s'révolter
Avec ses petits poings crispés
L'entarté

Dix fois, vingt fois fut humilié
Par de la simple crème fouettée
Et espère s'en relever
J'ai peur que ce soit mal barré

L'entarteur nous a bien vengé
De ce Jean-Paul Sartre dévalué
Qui vient nous pondre à la télé
Ses vieux discours bien éculés
L'entarté

L'idole de Saint-Germain-des-Près
Bien qu'il écrive avec ses pieds
A la prétention insensée
De nous dire ce qu'il faut penser

Au Flore, Aux Deux Magots, planté
Devant une coupé millésimée
Il refait le monde, persuadé 
D'avoir un rôle à y jouer
L'entarté

Il s'est essayé au ciné
La France entière a rigolé
Lorsque les salles n'ont pas été
Au milieu du film désertées

En Bosnie il a bien tenté
D'jouer les héros, les Hemingway
Reporter de guerre embusqué
L'entartage, oui, pas les mortiers
L'entarté

La mère Beauvoir pour fiancée
C'aurait bien plu à l'entarté
Mais il semble qu'il se soit maqué
'Vec une petite bien mieux roulée

Poupée Barbie bien allumée
Mais non, j'ai pas dit déjantée
Malgré ses ch'veux peroxydés
L'est plus sympa que son Simplet
L'entarté

J'veux des entarteurs par milliers 
J'vais moi-même apprendre le métier
Y'en a bientôt qui vont trinquer
C'est pas les cibles qui vont manquer

Oublions ce pauvre B.H.V.
L'a suffisamment dérouillé
Y'a d'autres pédants à s'occuper
Que c'pauvre garçon trop bien coiffé

Et surtout longue vie à Le Gloupier !


Boucan d'enfer

On reconnait le bonheur paraît-il
Au bruit qu'il fait quand il s'en va 
C'était pas l' dernier des imbéciles 
Celui qu'a dit ça 
Le mien s'en est allé hier 
Après vingt berges de sous mon toit

Ca a fait un boucan d'enfer 
Je ne supporte pas 
Ca fait croire un peu qu' les proverbes 
Disent pas toujours n'importe quoi 
Adieu l'amour, bonjour la merde 
Qui tombe sur moi

C'était pas un petit bonheur pépère 
D'épicerie ou de bar tabac 
C'était un bonheur grand comme la terre 
Même plus grand que ça 
Grand comme tous les volcans d'Auvergne 
Comme un palais de Maharaja 
Comme le trésor dans la caverne d'Ali-Baba

P't'être qu'il était devenu fragile 
P't'être qu'il était trop grand pour moi 
Peu importe, toujours est-il 
Je l'voyais pas

Mon amour a claqué la porte 
Mais j'étais pas du bon côté 
Là, pareil à une feuille morte 
Sur le pavé

J'ai beau chercher auprès des potes 
Le réconfort de l'amitié 
Les pauvres, z'en auront plein les bottes 
De m'voir pleurer 
Parce que dans ces cas là mon pote 
Tu te fous de la dignité 
Quand tu sais que tes amours sont mortes 
A tout jamais

On reconnait le bonheur parait-il 
Au bruit qu'il fait quand il s'en va 
C'était pas le dernier des imbéciles 
Celui qu'a dit ça

Le bonheur s'est cru devoir partir 
Après vingt berges de sous mon toit 
Je n'ai plus qu'une envie, c'est mourir 
Mais ça s'fait pas

Mon coeur ressemble à Tchernobyl 
Et ma vie à Hiroshima 
Pourtant y'a bien pire que mourir 
Y'a vivre sans toi.
 

Mon nain de jardin

Déjà que j'avais pas grand chose
Dans ma petite vie pas toujours rose
Dans mon petit pavillon de banlieue
Oublié des hommes et de Dieu
Entre ma petite femme et mon chien
J'avais que la télé et puis rien
A peine un petit carré de pelouse
D'un mètre vingt trois sur un mètre douze
Où il trônait comme un pacha
Mon petit Simplet qui n'est plus là

Si je tenais l'enfant de gredin
Qui m'a volé mon nain de jardin
Je lui ferais passer le goût du pain
Je lui ferais passer le goût du pain

C'était un vrai petit nain de Blanche-Neige
Pantalon rouge et polo beige
Pas une saloperie en plastique
La plus jolie des céramiques
Mettait du soleil sur ma pelouse
Toutes les fleurs en étaient jalouses
Il tenait compagnie aux oiseaux
Putain de Dieu, qu'il était beau
Avec son petit bonnet pointu
C'était le plus joli de la rue

Refrain

Si on me demande une rançon pour lui
Je filerais deux mois de mon R.M.I.
Je veux plus voir mon jardin tout nu
Je veux revoir le sourire ingénu
De mon petit nain
Qui mine de rien
Se retrouve aujourd'hui orphelin
On m'a taxé ma seule richesse
Et je réalise avec tristesse
Que les voleurs c'est malheureux
Volent toujours à plus pauvres qu'eux

Refrain (3 fois)
 

Mal barrés

Un petit couple d'amoureux
Dans un bistrot de banlieue
Assis sur la banquette
Se roule des pelles à qui mieux-mieux
Les prolos silencieux
Observent la conquête
Moi je suis accoudé au bar
Et je rigole à part
En matant le tableau
Je les vois vingt ans plus tard
Et ça me fout un cafard
A couper au couteau

C'est tout jeune et ça ne sait pas
Que pour les amoureux
Hélas
La vie est bien dégueulasse

Un beau jour les filles se cassent
Et voilà
Un petit couple d'amoureux
Se regarde dans les yeux
Et parle d'avenir
D'une vie en rose et bleu
Que des moments heureux
De la joie, du plaisir
Moi je pense à la jalousie
A la haine, à l'ennui
Qui s'installent chaque jour
Je pense à la vie quotidienne
Je pense au poids des chaînes
Qui détruisent l'amour

C'est tout jeune et ça ne sait pas
Que pour les amoureux
Hélas
La vie est bien dégueulasse

Un beau jour l'amour se lasse 
C'est comme ça
Un petit couple d'amoureux
Qui ferait peut-être mieux
D'en finir tout de suite
Quelques ébats délicieux
Pour trois jours, puis adieu
On s'aime et on se quitte
Pourquoi vouloir à tout prix
Vivre toute une vie
Dans la même galêre
Le bonheur reste toujours
L'affaire de quelques jours
Pas d'une vie entière

C'est tout jeune et ça ne sait pas
Que pour les amoureux
Hélas
La vie est bien dégueulasse

Un beau jour l'amour se casse
Un beau jour l'amour se casse
Comme toi


Corsic'armes

On se connaissait peu, je le croisais parfois
Dans un bar parisien, à deux pas de chez moi
Nous buvions quelques verres, jusque tard dans la nuit
Etait-ce le chemin pour devenir amis ?
Il m'expliquait sa terre, son peuple, son pays
J'écoutais en silence, attendri
Me parlait d'Ajaccio, de Calvi, de Bastia
Des corrompus notoires, des élus, des mafias
Et des encagoulés réunis au fond des bois
Pour défier la justice et ce putain d'état
Moi qui ai toujours aimé, tous les Robins des Bois
Les peuples insoumis, j'aimais ça
S'est fait buter un soir aux abords du maquis
S'est fait flinguer, pourquoi et par quel ennemi ?
Avait-il tué d'abord, pour être tué aussi ?
Etait-il un rebelle, était-il un bandit ?
Tu me manques ce soir, et je parle de toi
A ta douce compagne qui pleure près de moi
Les mots qu'elle ne dit pas, c'est la loi de l'Omerta
De ce pays que j'aime quand il vit libre, épanoui
Loin du bruit, de la fureur, des fusils.


Mon bistrot préféré

Mon bistrot préféré quelque part dans les cieux
M'accueille quelquefois aux jardins du Bon Dieu
C'est un bistrot tranquille où il m'arrive de boire
En compagnie de ceux qui peuplent ma mémoire
Les jours de vague à l'âme ou les soirs de déprime
Près de quelques artistes amoureux de la rime
Je vide deux, trois verres en parlant de peinture
D'amour, de chansonnettes et de littérature
Il y a là bien sûr, des poètes le Prince
Tirant sur sa bouffarde, l'ami Georges Brassens
Il y a Brel aussi et Léo l'anarchiste
Je revis avec eux une célèbre affiche
Trenet vient nous chanter une folle complainte
Cependant que Verlaine et Rimbaud à l'absinthe
Se ruinent doucement en évoquant Villon 
Qui rôde près du bar et des mauvais garçons
L'ami René Fallet me parle de ses touches
Qui me font frissonner quand il pêche à la mouche
Et du vin et des femmes et surtout des copains
Qui font la vie plus belle, le désespoir plus loin
Il y a Boris Vian, Maupassant et Bruant
Ecoutant les histoires d'un Coluche hilarant
Je m'assois avec eux pour quelques libations
Entouré de Desproges, et Reiser, et Tonton
Nous rigolons des cons avec Frédéric Dard
Souvenirs de prison avec le vieux Boudard
Audiard et puis Pagnol s'allument au Pernod
Je lève mon verre à Robert Doisneau
Gainsbourg est au piano jouant sa Javanaise
Et nous chante l'amour qu'il appelle la baise
Dewaere est là aussi dans un coin
Et il trinque avec Bernard Dimey, avec Bobby Lapointe
Assis autour du poêle il y a Jacques Rigaut, 
Franquin, Jean-Pierre Chabrol, Prévert et son mégot
Nous parlons de suicide Maurice Ronet arrive
La mort est quelquefois tout un art de vivre
Mon bistrot préféré quelque part dans les cieux
Je l'avoue, désolé manque de femme un peu
Et les amis des potes qui le hantent toujours
Savent aussi bien qu'elles ce que c'est que l'amour
Ils sont bien plus vivants dans ma mémoire au moins
Que la majorité de mes contemporains
Si demain la faucheuse vient me prendre la main
Pourvu qu'elle me conduise au bistrot des copains.